Une télématique de plus en plus ‘mobile’

Multiplication des sources de données, explosion du ‘mobile’, intégration du Big Data… la télématique embarquée va encore rendre de sérieux services aux transporteurs. Mais qui paiera pour quoi ? Alors que les taux d’équipements des flottes européennes de poids lourds en télématique ne cessent de progresser, c’est aujourd’hui l’objet connecté qui accélère la percée. Des données pertinentes sont aujourd’hui générées non seulement par le camion, son tachygraphe ou sa carte carburant, mais aussi par ses pneumatiques, ses capteurs de charge à l’essieu, ses portes, ses groupes frigorifiques, ses freins ou son OBU servant à payer l’un ou l’autre péage. Supprimer les silos Gérer l’ensemble de ces données de manière séparée représente d’une part une perte de temps, mais aussi un manque à gagner considérable, comme l’explique Minh Le (Product Manager chez Worldline) : « Jusqu’à présent, nous continuons à faire la même chose qu’avant. Résultat : un gestionnaire de flotte doit toujours faire son travail avec plusieurs écrans et plusieurs systèmes. C’est ridicule… Nous devons passer d’une télématique embarquée traditionnelle à un ‘internet des véhicules’, comme on parle déjà d’un ‘internet des objets’. C’est un changement de paradigme complet, où plusieurs apps travailleront en harmonie en éliminant toutes les redondances. » Le modèle proposé par Le (voir illustration) est séduisant, mais il suppose que toutes les parties qui génèrent des données se mettent d’accord sur la notion de propriété… et de valeur des données. Sur le papier, tout le monde est d’accord pour dire qu’on a davantage intérêt à partager ‘ses’ données pour générer des services à valeur ajoutée qu’à les conserver pour soi. Dans la pratique, cependant, personne n’est prêt à partager ses données pour rien… et tout le monde veut être au centre du système. Combat de coqs Quelques jours avant la conférence de TU Auto, une polémique médiatique enflait en Allemagne. Suite au succès du European Platooning Challenge, il est apparu que des pelotons autonomes devraient être multi-marques, et même multi-transporteurs pour justifier leur utilité. Il faut donc que tous les camions communiquent entre eux, sur base d’une seule norme. Daimler a proposé aux autres constructeurs de rejoindre sa plate-forme Fleetboard. Le 16 avril, réponse sans appel d’Andreas Renschler, responsable de la branche véhicules utilitaires chez Volkswagen AG : « Nous ne voulons pas collaborer avec Daimler, et nous développons d’ailleurs notre propre plate-forme télématique pour l’ensemble de nos marques. » Face à ce combat de coqs (Renschler et Wolfgang Bernhard, le ‘patron’ de Daimler Trucks, ne s’apprécient guère), un observateur avisé présent à la conférence de TU Auto faisait remarquer qu’Andreas Renschler, lorsqu’il a quitté Daimler, a emporté avec lui le responsable de Fleetboard (Markus Lipinski) et ses meilleurs développeurs. C’est ce qui autorise Renschler à annoncer un ‘feu d’artifice’ de services connectés chez MAN et Scania à partir de l’IAA. L’ego des deux grands groupes allemands et de leurs patrons respectifs ne doit cependant pas occulter le véritable débat : il y aura (un jour) une plate-forme commune, qui s’alimentera aux données générées par tous les constructeurs. Le tout est que chacun puisse valoriser ‘ses’ données. « Cela prendra dix ans, avertit Minh Le, comme il a fallu dix ans pour parvenir à faire fonctionner un modèle collaboratif pour le paiement sans contact. Il est légitime de se demander si les fournisseurs de solutions télématiques, par exemple,  doivent payer pour utiliser des données générées par le véhicule, mais la seule manière d’avancer est de faire travailler tous les créateurs de données ensemble, sinon on conservera les ‘silos’ actuels’. » Au stade actuel, une seule chose est certaine : le hardware évolue à vitesse accélérée vers le statut de commodité. Ce n’est plus lui qui génère la richesse,  ce sont les données. C’est ce qui fait dire à Torsten Loheymer (Associate Partner Automotive Industry chez IBM) que « l’industrie automobile dans son ensemble est aujourd’hui au même point de basculement que l’industrie de la téléphonie à l’apparition du smartphone. » Sous-entendu : il y aura des gagnants et des perdants. Uptime Mais que cette bataille réserve-t-elle aux gestionnaires de flotte ? Le seul transporteur du panel rappelait qu’il ne voulait pas recevoir des informations sur ce qui se passe comme prévu, mais uniquement sur les anomalies. C’est juste, mais cela témoigne d’une vision très traditionnelle des choses. La télématique 2.0 doit non seulement permettre de réduire le TCO et les coûts opérationnels, mais aussi d’augmenter les taux d’utilisation de la flotte. Comme le rappelle Brian Bolam (fondateur de TG Matrix), le taux d’utilisation des camions immatriculés au Royaume-Uni n’est de 43 %. Pour un secteur nécessitant autant d’investissement que le transport routier, c’est beaucoup trop peu. Le véritable défi est là… Autres tendances

  • L’utilisation de smartphones se généralise, mais se focalise sur les sous-traitants et les gestionnaires de flotte
  • La protection de la vie privée se règlera en Europe via un règlement général qui entrera en vigueur en 2018. Ce règlement GDPR semble assez protecteur pour les données privées.
  • La suppression des frais de roaming en juin 2017 va rendre l’utilisation des apps moins chère. Les apps deviendront donc de plus en plus universelles.
  • Il existe un ‘standard FMS’ qui règle la manière dont les chaînes cinématiques des camions (via le Canbus) communiquent (une partie de) leurs données (régime, passage des rapports, consommation…) aux ordinateurs de bord indépendants. Une norme similaire, appelée rFMS (‘r’ pour ‘remote’ – à distance) existe depuis 2015 pour communiquer avec des appareils mobiles, et sa version 2.0 est attendue dans les prochains mois.

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