VUL électrique et leasing opérationnel : à quand le coup de jus pour les loueurs ?

La vague électrique semble désormais toucher de manière inexorable le secteur de l’utilitaire léger. Derrière les pionniers, d’autres constructeurs sont à l’aube du lancement d’un ou plusieurs modèles. Le mouvement est lancé. Et avec lui se pose la question des modes d’acquisition de ces utilitaires d’un genre nouveau. L’achat, bien sûr. Mais aussi la location longue durée.

« L’utilitaire ne représente que 8 à 9 % du marché global du leasing opérationnel, souligne Marc Fumagalli, Leasing & Fleet Marketing Manager chez Renault. « En général, les clients préfèrent un leasing financier ou un renting financier qui leur permet de racheter le véhicule par la suite. Ce qui évite aussi le problème d’assurer la remise en état du véhicule en fin de contrat. »
Déjà restreint à la base, ce marché l’est encore davantage lorsqu’on se limite aux VUL électriques. S’ils ne parlent que de quelques unités, voire quelques dizaines, les loueurs constatent tout de même que les lignes commencent à bouger.
« Fin octobre de l’année dernière, nous étions partenaire de l’eVan Xperience organisée par Transportmedia, explique Gerald Vanmaele, Marketing & Communications Manager chez J&T Autolease. « A cette occasion, nous avons pu objectiver l’intérêt croissant pour ces solutions. Certains de nos clients ont pu réaliser des essais de véhicules utilitaires électriques, ce qui était assez intéressant. »

C’est combien ?

De l’intérêt à la concrétisation, il y a un pas. Certains l’ont déjà franchi mais des éléments objectifs constituent un frein majeur à l’épanouissement du véhicule électrique. Un manque d’attractivité qui remet logiquement en cause la pertinence des contrats de location. Le premier obstacle, c’est le prix. La différence est énorme entre un utilitaire électrique et un équivalent Diesel.
« Cela peut aller du simple au double, constate Sven Pauwels, Communication Officer chez ALD Automotive. Et comme, contrairement à la voiture, les utilitaires sont déductibles à 100 % fiscalement quelle que soit leur motorisation, la différence de coût ne peut être récupérée de ce côté-là. »

Avec le prix et l’autonomie, le sous-développement des infrastructures de recharge est actuellement un frein à l’expansion des utilitaires électriques.

« Dans le cas du leasing, l’un des principaux facteurs pour déterminer le montant d’un loyer est la valeur résiduelle, pointe Cyriel Vrijders, Commercial Director chez Fraikin Benelux. Or, un vrai doute plane à ce sujet. Beaucoup de nouveaux modèles électriques sont attendus et la technologie pourrait évoluer très vite, ce qui augmente le risque pour les loueurs sur les modèles actuels. »Voilà qui pose question. Un châssis de véhicule électrique qui coûte aujourd’hui le double d’un équivalent Diesel pourra-t-il être revendu deux fois plus cher dans 5 ans ? Ce véhicule qui présente une autonomie de 120 km aura-t-il encore un intérêt pour un acheteur potentiel ?

Les besoins d’abord

Déterminer le risque est aussi compliqué que déterminant. Car si les loueurs réduisent la valeur résiduelle pour assurer leurs arrières, les loyers vont s’envoler. Or, ils sont déjà de 50 à 60 % supérieurs à ceux des véhicules équivalents à moteur thermique…
« Un autre élément qui freine le développement de l’électrique est l’autonomie qui reste limitée, analyse Sven Pauwels. Cela limite forcément les applications. Enfin, les infrastructures de recharge sont nettement trop peu développées à l’heure actuelle en Belgique et les temps de charge vont à l’encontre des modèles économiques auxquels nous sommes habitués. »
« Tout dépend de ce que le client veut faire, enchaîne Cyriel Vrijders. S’il destine son véhicule à une utilisation urbaine, nous allons peut-être pouvoir jouer la carte électrique. Il faut bien analyser la demande du client en fonction d’un tas de critères : l’utilisation, les distances à parcourir, les cotes et la charge utile nécessaires, le dimensionnement de l’éventuel groupe frigo… Et je dois bien reconnaître qu’aujourd’hui, le résultat de cette analyse penche dans la plupart des cas en faveur du Diesel. »
Vu leur mode de fonctionnement, les loueurs n’ont donc pas de raisons objective de pousser l’électrique. Ce qui leur importe, c’est de trouver la meilleure solution pour chacun de leurs clients.

Multimarques, captifs : même combat

Quant à la question de la possible distorsion que pourrait créer le van électrique entre les offres des loueurs multimarques et celle des captifs en faveur de ces derniers vu leur meilleure visibilité sur cette technologie nouvelle, elle ne se pose pas encore. Certes, les captifs ont le pouvoir et les moyens d’aller plus loin dans la démarche. Mais aucun d’eux ne signe des dizaines de véhicules à l’heure actuelle.
« Il nous arrive d’être confrontés à des loueurs captifs qui sont plus agressifs dans leurs valeurs résiduelles parce que les interventions sont assurées par les réseaux qui ont derrière eux le poids des importateurs, ajoute Gerald Vanmaele. Néanmoins, cela reste anecdotique et, dans le cas qui nous occupe, je pense que les captifs sont dans le même bain que nous. Personne ne sait vraiment comment le marché de l’électrique va progresser ni comment la technologie va évoluer. Comme ces véhicules deviennent de plus en plus chers, peut-être que dans 4 ans, des gens qui veulent rouler à l’électrique sans pouvoir se payer un véhicule neuf se tourneront vers ces occasions. Si cette demande se crée, cela influencera positivement les valeurs résiduelles… Mais aujourd’hui, en commençant à proposer ces véhicules, nous prenons un certain risque, au même titre que nos concurrents multimarques et captifs. »

La jeunesse des utilitaires électriques et leur possibilité de rapide évolution compliquent le calcul de la valeur résiduelle et du risque pour les loueurs.

A tâtons

Chacun s’accorde sur le fait que les contrats seront amenés à évoluer en fonction de l’expérience emmagasinée. Aujourd’hui, ils sont très proches de ceux qui régissent la location de véhicules thermiques, avec quelques nuances. « Là où le standard en thermique est sur du 48 mois et 120.000 km, on se retrouve ici plutôt ici avec un maximum de 80.000 km sur une période identique », constate Marc Fumagalli.
« Un bon point va à l’entretien qui est peu coûteux puisqu’il se limite aux freins et aux pneus, ajoute Cyriel Vrijders. Pour les batteries, la plupart des marques donnent une garantie sur le produit et une garantie de puissance jusqu’à 5 ans. Dans ce cas, comme il est couvert sur la totalité du contrat, le risque sur les batteries est amoindri mais celui sur la valeur résiduelle reste entier. »
Pour Gerald Vanmaele, la principale complication concerne l’infrastructure de recharge : « Certains clients nous disent : ok, nous signons un contrat mais nous souhaitons qu’une borne de recharge comprise dans le contrat de leasing soit installée au domicile du conducteur ou au siège de l’entreprise. Cela complique un peu les choses mais c’est tout à fait possible. Le leasing peut par ailleurs être assorti d’un système de cartes de recharge comparable à celui des cartes carburant. »
Le recul reste donc insuffisant, d’autant que la plupart des contrats actuels concernent des fourgonnettes. Les VUL électriques de plus grands gabarits s’inscriront parfois dans une logique différente et impliqueront d’autres contraintes qui nécessiteront d’adapter les contrats.

Quels incitants ?

La technologie électrique sera-t-elle définitivement considérée comme la solution d’avenir au regard des autres motorisations ? De quelle manière son acquisition et son usage seront encadrés fiscalement ? « Aucune incentive n’existe aujourd’hui pour favoriser l’acquisition de véhicules électriques », regrette Marc Fumagalli. « Le politique dit vouloir passer à des solutions plus propres, mais la Flandre supprime la prime à l’acquisition d’un véhicule électrique et la déductibilité fiscale passe de 120 à 100 % sur les voitures. On réduit les aides au lieu de les pousser. Côté utilitaire, les motorisations sont toutes sur un même pied. C’est un peu paradoxal. Sans compter que nous restons sans gouvernement. Le jour où il y en aura un, va-t-il modifier la fiscalité automobile ? Beaucoup de sociétés sont dans l’expectative et préfèrent prolonger un contrat d’un an sur une location en attendant de voir comment les choses vont évoluer. »
« Attention, tempère Sven Pauwels, qu’au niveau fiscalité, si l’on incite une entreprise à se tourner vers un utilitaire qui n’incarne pas ses besoins réels, les répercussions peuvent se faire sentir au niveau de sa mobilité et de sa rentabilité ! Lorsqu’ils sont là, les avantages fiscaux sont bons pour conforter un choix mais ils ne doivent pas pour autant pousser les utilisateurs vers une direction qui n’entre pas dans leur stratégie. »
Encouragé ou pas, dans les flottes des loueurs comme ailleurs, l’utilitaire électrique a donc tout à prouver pour sortir de la niche dans laquelle il se confine à l’heure actuelle.

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