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Truck & Business Barometer: marée basse

Morose. Cette année 2024 est tout simplement morose et la relance de l’activité économique n’a pas eu lieu au quatrième trimestre comme espéré. Pourtant, on ne peut pas parler de dépression généralisée chez les transporteurs belges. Il y a encore du carburant dans le moteur mais il faudrait surtout que le bateau puisse naviguer dans des eaux un peu plus profondes.

Les chiffres bruts sont parfois trompeurs : le taux de satisfaction des transporteurs belges par rapport aux 12 mois écoulés reste correct (6,33 sur 10) mais cette moyenne est trompeuse : la proportion de transporteurs très peu satisfaits est en nette hausse et le paysage est donc plus polarisé que jamais.

Les ports, la chimie, la construction…

Les raisons de se plaindre sont particulièrement nombreuses chez les transporteurs actifs dans le transport de conteneurs (voir à ce sujet la table ronde consacrée au port d’Anvers en page 50) mais la grogne s’accentue dans le transport de produits chimiques et le secteur de la construction.

A l’autre bout du spectre, le secteur des biens de grande consommation est resté porteur, surtout pour les entreprises qui ont réussi à attirer de nouveaux clients avec des concepts logistiques complets. Les entreprises agissant en sous-traitance dans ce secteur se trouvent un peu entre deux eaux, avec des volumes de transport corrects mais une concurrence accrue et une pression sur les prix constante.

Dans sa dernière enquête de conjoncture trimestrielle, l’ITLB signale une baisse de l’activité de 5,6 % tant en transport national qu’international. Cela fait suite à deux années de baisse consécutives (respectivement -3,5 et -5,5 % en 2022 et -7,2 et -8,8 % en 2023) mais il faut prendre ces chiffres avec prudence : il s’agit de soldes de réponse pondérés et le nombre des kilomètres parcourus par les camions belges sur le réseau Viapass n’a certainement pas baissé de 16 % en trois ans mais bien de 5 % (à réseau comparable). Néanmoins, la baisse des volumes à transporter atteindrait 2,2 % sur les douze derniers mois, ce qui est inédit depuis 2013, et l’équilibre entre l’offre et la demande est mauvais depuis plus d’un an.

La proportion des entreprise qui signalent une pression à la baisse sur leurs tarifs de transport est cependant en légère baisse (presque 46 % tout de même). Finalement, seule la difficulté à recruter des chauffeurs semble servir de tampon entre les chargeurs et les transporteurs : puisque la concurrence se trouve généralement dans la même situation, cela ne lui permet pas de casser les prix… sauf exception. Cette édition 2024 du Baromètre met en effet en évidence une concurrence exacerbée de la part de sociétés turques… ou de sociétés belges aux racines turques.

Pour le reste, plusieurs participants au Baromètre regrettent l’annulation du retour du camion au pays dans le cadre du Paquet Mobilité. Alors qu’ils avaient complètement abandonné leur filiale en Europe centrale, ils se demandent si ce détricotage ne va pas leur amener une nouvelle forme de concurrence déloyale.

Nouvelle hausse du prix de revient… et des tracasseries

L’impact de cette morosité économique sur la rentabilité des entreprises semble cependant limité pour le moment : le pourcentage de répercussion du prix de revient sur le prix de vente baisse un peu mais atteint tout de même 62,2 % (voir graphique) alors qu’il lui est arrivé de ne pas dépasser les 20 %. Six transporteurs sur 10 nous déclarent également qu’ils ont jusqu’à présent pu négocier des prix de transport corrects.

Les perspectives pour les 12 mois à venir sont cependant peu enthousiasmantes. D’une part, il n’y a presque personne pour penser que l’économie va connaître un rebond bientôt. D’autre part, les incertitudes géopolitiques mondiales (et en particulier l’élection de Donald Trump) font craindre pour l’avenir de l’industrie locale. Mais les transporteurs sondés s’attendent tout de même à voir les volumes de transport repartir (légèrement) à la hausse (+ 0,69 %) alors que l’an dernier ils pariaient sur une baisse… qui s’est bel et bien matérialisée. Par conséquent, le niveau de confiance des sondés remonte légèrement à 5,56 / 10 (voir graphique).

Cependant quelques facteurs locaux mettent un bémol aux visions optimistes : une nouvelle hausse des salaires en vue, le remplacement de nombreux tachygraphes, la surcharge administrative et, de plus en plus, l’anarchie au niveau des interdictions de circuler. Les plaintes en ce sens viennent surtout du côté flamand, que ce soit à cause du Vrachtroutenetwerk ou de l’attitude de très nombreuses communes. Ce sont autant de petites vexations qui minent le moral peu à peu.

Or, c’est justement le volontarisme qui permet à certains entrepreneurs de garder le moral : que ce soit grâce à la motivation du personnel, à l’innovation technologique, à de nouveaux concepts logistiques ou au gain de nouveaux clients, les transporteurs belges refusent de baisser les bras.

Les flottes maigrissent

L’an dernier, les incertitudes économiques n’avaient pas encore un impact majeur sur la gestion des flottes. Les choses changent cette année : une entreprise sur trois envisage d’utiliser moins de camions dans les 12 mois à venir et le pourcentage des sondés qui n’envisagent aucun investissement l’année prochaine reste stable autour de 20 %. Signe des temps : les transporteurs qui réduisent leur flotte compteront sur la sous-traitance pour absorber les éventuels pics d’activité.

Si l’on zoome sur les camions électriques, on constate que deux tiers des transporteurs sondés ont un plan de décarbonation et qu’un transporteur sur 20 sait déjà quand il ne roulera plus du tout avec des véhicules à moteur thermique. Il subsiste certes 6 % de transporteurs qui ne sont pas encore convaincus qu’ils devront décarboner leurs activité mais le message percole de plus en plus. Et à ce stade, c’est la difficulté à répercuter le surcoût des camions électriques sur les prix de vente qui est perçu comme le principal obstacle à l’électrification.

Un transporteur sur deux n’a plus de problèmes de recrutement.

Chiffres-clés

6,33/10 : le taux de satisfaction remonte légèrement (+ 0,05 % par rapport à 2023)

– 2,22 % : la baisse moyenne des volumes de transport constatée en 2024

+ 0,83 % : la hausse estimée des volumes de transport pour 2025 (+ 2,76 %)

58,4 % des transporteurs souffrent d’une pénurie de chauffeurs (+ 34,3 %)

57,9 % des transports sont effectués à des prix ‘corrects’ (- 8,7 %)

19,6 % des transporteurs gèlent leurs investissements (+ 0,3 %)

79,4 % des transporteurs maintiennent le rythme de renouvellement de la flotte (-1,2 %)

Didier Michel (TFM Group): « On va se battre, comme d’habitude » 

« Le secteur du transport est vraiment mis à mal. Heureusement que la logistique ‘cartonne’ chez nous ! Mais en transport, tout devient de plus en plus cher et la pénurie de chauffeurs est toujours là. Il faut donc insister pour que tous les transporteurs augmentent leurs tarifs et intensifier les collaborations entre collègues honnêtes et respectueux. C’est la seule manière pour le secteur de relever la tête. De notre côté, nous continuons à nous battre et je continuerai à me battre comme je le fais depuis cinq ans pour faire défiscaliser les heures d’attente des chauffeurs. »

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