Il manque 8.000 à 9.000 chauffeurs en Belgique. Les entreprises veulent se démarquer de leurs concurrents afin d’attirer ces chauffeurs rares. Dans la mesure où les salaires ne peuvent pas augmenter, ils expérimentent désormais les avantages extralégaux.
La pénurie est en partie due à une reprise de l’économie. Généralement, dans ces circonstances, les salaires augmentent, mais en Belgique, ce n’est pas possible en raison de la loi de modération salariale du précédent gouvernement Michel, qui n’autorisait qu’une augmentation de 0,4 % en plus de l’indice. Aux Pays-Bas, le salaire des chauffeurs peut croître de 3 %. Résultat : nos entreprises ont beaucoup de mal à recruter de nouveaux chauffeurs avec les salaires existants et à conserver l’effectif en place. C’est pour cette raison qu’elles se tournent vers les avantages extralégaux.
« Les transporteurs qui souhaitent accorder des avantages extralégaux à leurs chauffeurs nous posent de nombreuses questions. Notamment sur l’utilisation des véhicules utilitaires, des voitures particulières, mais aussi des chèques-repas, des bonus et même des warrants », précise Bruno Velghe, directeur du secrétariat social Paycover.
Voitures et repas
Certaines sociétés de transport ont été citées dans la presse car elles proposent à leur chauffeur une voiture de société. « Ce n’est pas encore très fréquent. Ce qui l’est davantage, c’est la possibilité pour les chauffeurs d’utiliser les véhicules de l’entreprise pour leurs déplacements domicile – travail. L’avantage est dans ce cas moins important. Ces voitures ne sont pas adaptées pour partir en vacances en famille par exemple. Souvent, elles n’ont même pas de banquette arrière. Mais cela peut faire une différence pour une famille qui ainsi peut éviter d’acheter une deuxième voiture. L’avantage diffère également d’une entreprise à l’autre. Chez certains transporteurs, les chauffeurs rentrent chez eux avec leur camion, chez d’autres ce n’est pas possible car il est chargé la nuit », explique Bruno Velghe.
Souvent, les chauffeurs sous contrat de travail ne reçoivent pas de chèques-repas, contrairement aux employés. Etendre l’avantage à cette catégorie de salariés est dès lors une option rapide. Les voitures de société et les chèques-repas constituent des avantages qui, une fois accordés, ne peuvent être supprimés aisément. C’est un droit acquis.
Bonus et warrants
De nombreuses entreprises optent désormais pour un bonus par souci de flexibilité. Elles accordent aussi plus souvent des warrants (options financières qui donnent aux salariés le droit d’acheter une part de l’entreprise). « Pour l’instant, les affaires sont bonnes. Si le bénéfice est plus élevé que prévu, on peut verser un bonus au personnel. Le gouvernement rend cet instrument très attractif car le salarié n’a pas à payer d’impôt dessus tant que le montant reste inférieur à 3.447 € par an. En pratique, la plupart des transporteurs accordent un maximum de 1000 € par an. Le gros avantage est que l’attribution peut être conditionnelle. Sans bénéfice, aucun bonus. Personne ne sait comment évoluera la situation sur le marché du travail et, surtout, comment évolueront les tarifs des transports », explique Bruno Velghe.
« On constate que les transporteurs combinent aussi souvent plusieurs avantages extralégaux. Les entreprises qui n’ont pas souffert de la crise sanitaire notamment – celles qui sont actives dans des secteurs comme l’alimentation, la distribution ou la pharmacie par exemple – mettent tout en œuvre pour retenir les chauffeurs. De plus, on constate que des entreprises qui ont longtemps hésité franchissent maintenant le pas. La pression sur le marché du travail est trop forte. Si les autres entreprises le font, alors elles sont obligées de le faire aussi », explique Bruno Velghe.
Velghe souligne en outre que les économistes s’attendent à ce que la bonne conjoncture économique actuelle des transports ne soit que temporaire. « Actuellement, il y a un mouvement de rattrapage après la crise sanitaire et la perturbation du commerce mondial. Mais cette tendance aura une fin : les spécialistes pensent que les activités continueront de croître jusqu’au Nouvel An chinois en février 2022, mais se normaliseront ensuite à nouveau. »
Texte : Peter Ooms