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[VIDEO] Débat politique Truck & Business : ambitions durables contre réalité économique

Lors de la présentation du nouveau Truck & Business, les représentants des différents partis politiques de part et d’autre de la frontière linguistique ont fait la lumière sur les soupirs et les défis du secteur des transports.

Georges Gilkinet (Ministre fédéral de la Mobilité pour Ecolo), François Bellot (ancien Ministre de la Mobilité, député wallon du MR), Julien Matagne (député wallon des Engagés) et Ibrahim Dönmez (député bruxellois du PS) ont croisé le fer pour un débat sur les différents défis qui restent à relever pour mettre la Wallonie et Bruxelles au diapason d’un transport routier plus durable.

Une question importante se pose d’emblée : le réseau routier (wallon) est-il prêt pour l’électrification massive attendue du trafic routier ? Le ministre Gilkinet voit les choses de la manière suivante : « La manière dont nous produirons et consommerons l’énergie à l’avenir changera. En tant que Verts, nous visons une production d’énergie renouvelable qui rendra l’Europe indépendante sur le plan énergétique. Veiller à ce que l’approvisionnement en énergie des citoyens et des entreprises ne soit pas compromis est un défi majeur. Nous réfléchissons actuellement aux moyens d’utiliser les batteries des véhicules électriques comme capacité de stockage ».

Julien Matagne remet en cause cette ambition : « Je doute que nous atteignions les objectifs européens ambitieux en matière d’électrification », déclare-t-il. « Des carburants alternatifs seront également nécessaires dans le secteur des transports. En Wallonie, les investissements nécessaires à la rénovation du réseau électrique et à l’installation de stations de recharge n’ont pas encore été réalisés. À cet égard, la Wallonie est un trou noir sur la carte européenne. Le ministre investit à juste titre beaucoup dans d’autres modes de transport, mais l’attention doit également se porter sur le transport routier de marchandises. En Wallonie, il n’est tout simplement pas encore possible de tout faire par le biais de formes alternatives de transport.

François Bellot est également sceptique. « Je ne crois pas aux camions électriques de 40 tonnes en 2050. Les batteries pèsent cinq tonnes et il faut les recharger tous les 250 kilomètres. Je crois à l’électrification, par exemple, des bennes à ordures et des camions plus petits, des bus, etc. Je réserve les biocarburants au transport routier lourd, maintenant qu’il est clair que l’électrification du parc de voitures particulières est en bonne voie. Je crois également à la technologie de l’hydrogène pour les poids lourds. En contrepartie, il devrait y avoir un avantage fiscal approprié, uniformisé au niveau européen. Même si la part du train double, 70 % des marchandises continueront d’être transportées par camion.

Ibrahim Dönmez attire l’attention sur la situation spécifique de Bruxelles. « À Bruxelles, on investit beaucoup dans le dernier kilomètre, y compris via la voie d’eau. Mais l’électrification ne va pas assez vite. Il y a trop peu de stations de recharge par rapport aux pays voisins. Actuellement, la situation de la mobilité à Bruxelles est terrible. Le plan Good Move fait vraiment mal. Il crée beaucoup plus d’embouteillages et la pollution augmente. Nous avons besoin d’un plan de mobilité plus intelligent et mieux consulté.

 

 

Durabilité, fiscalité, rentabilité…

En attendant, les transporteurs doivent aussi pouvoir gagner de l’argent. Les obligations en matière de durabilité et d’électrification ne pèsent-elles pas trop lourdement sur la rentabilité des entreprises de transport belges ? Et que pensent les participants au débat de l’idée de convertir l’avantage accordé aux professionnels du diesel en soutien à l’achat de véhicules électriques ?Pour le ministre Gilkinet, les deux vont de pair. « Nous devons encourager l’investissement par des déductions. Nous devons concrétiser ces propositions au sein de la Commission consultative fédérale. Nous devons lutter contre la concurrence déloyale de l’étranger. C’est aussi un défi pour la présidence belge de l’Union européenne ».

Pour François Bellot, soutenir le secteur est une évidence : « Le secteur n’a pas demandé cette transformation imposée, nous devons donc le soutenir. L’élimination du diesel professionnel n’est envisagée qu’en Belgique. Pensez à la viabilité des transporteurs belges dans un contexte international. Les transporteurs belges ont déjà perdu 50 % de leurs expéditions internationales en raison de la concurrence de pays où les normes sociales et salariales sont plus souples. Les Belges sont forts dans le domaine du transport spécialisé. Leur viabilité doit être préservée, non pas en introduisant des sanctions, mais en soutenant les investissements dans des formes de transport plus durables. Une adaptation de la tarification routière en fonction des émissions de CO2 pourrait faciliter la transition ».

Wallonie : rattraper le retard en matière de stations de recharge

Quoi qu’il en soit, il y a encore beaucoup de travail à faire en Wallonie pour atteindre les objectifs européens d’AFIR. La norme d’une borne de recharge pour 60 kilomètres est loin d’être atteinte. Julien Matagne entrevoit toutefois des solutions. « Dans les 2 à 5 prochaines années, plusieurs concessions de stations-service classiques arriveront à échéance. Il n’est pas évident pour elles d’investir dans des bornes de recharge maintenant. La politique de concession devrait être adaptée de manière à ce que les concessions électriques et classiques puissent être développées côte à côte. De cette manière, la transition peut être accélérée et il n’y a pas besoin de fonds publics.

La mise en commun des investissements, à l’instar de l’exemple flamand, pourrait être une solution. « C’est déjà le cas aujourd’hui », affirme François Bellot. « Les camions devraient pouvoir se recharger sur les lieux de déchargement, par exemple sur les grandes plateformes logistiques. Le réseau de recharge ne devrait donc pas se limiter aux grands axes de circulation. Quoi qu’il en soit, une coopération entre les secteurs public et privé est nécessaire pour doter ce réseau d’une puissance suffisante. Il faut penser à déployer le réseau électrique de la SNCB pour alimenter le transport routier ».

Selon Gilkinet, cette réflexion est sur la table. A Bruxelles, le réseau électrique de la STIB pourrait être utilisé de la même manière.

L’introduction d’une redevance kilométrique « intelligente », qui concernerait également les voitures particulières, suscite un débat animé. « Dans certains cas, une redevance kilométrique pour le transport privé conduirait à une taxe qui n’est pas sociale et qui augmente l’inégalité entre les citoyens », estime Ibrahim Dönmez. « Pensez aux personnes qui n’ont pas d’alternative pour se rendre au travail ou aux professionnels qui doivent effectuer des réparations urgentes. Une correction sociale des plans Smart Move est nécessaire ».

Julien Matagne s’y oppose également. « En Wallonie, les distances sont plus longues, les transports publics sont moins performants et il faut donc compter sur la voiture. Il faut cependant prévoir une taxe pour le trafic de transit. Utiliser la taxe kilométrique sur le transport de marchandises pour permettre d’investir dans des camions plus économes en carburant. Tout le monde y gagnerait ».

François Bellot émet quelques réserves. « La tarification routière actuelle n’est pas une taxe intelligente. Un habitant de la région de Dinant parcourt six fois plus de kilomètres qu’un habitant de la région de Liège. Une taxe kilométrique mal conçue est insupportable pour les citoyens et les familles de ces régions éloignées. Comme pour les zones à faibles émissions, il faut trouver des solutions harmonisées. C’est le travail des autorités régionales.

 

 

Le dernier mot

Quels sont les thèmes que nos débatteurs et leurs partis souhaitent aborder en priorité lors de la prochaine législature ? Georges Gilkinet : « Réaliser le transfert modal, renforcer la complémentarité entre le train et les autres modes. S’attaquer aussi aux problèmes de congestion, ce qui passe par des mesures courageuses plus respectueuses de l’environnement et la mise en place sans tabou de systèmes intelligents qui orientent les automobilistes vers d’autres modes et moments de transport. Je regrette parfois le manque de courage et de créativité de mes collègues ».

François Bellot est catégorique : « Nous connaissons les objectifs. Le monde politique a la responsabilité de travailler avec le secteur pour trouver un moyen d’atteindre ces objectifs. Les objectifs politiques doivent être réalisés en coopération avec le secteur de la logistique et du transport, qui est si important pour l’économie belge. Ne prenez donc pas de décisions qui vont à leur encontre, faites-le ensemble.

Julien Matagne met l’accent sur l’investissement et la fiscalité : « Investir dans le réseau, investir dans la formation des chauffeurs, et maintenir les avantages fiscaux sur le carburant, qui sont une pierre angulaire de la viabilité de nos entreprises de transport ».

Ibrahim Dönmez a le dernier mot : « Nous devons améliorer la mobilité en général. Nous avons besoin d’un plan de mobilité qui aide à résoudre les embouteillages coûteux ».

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