Réduire les délais de paiement : une obligation de bon sens

L’arrivée de la taxe kilométrique n’a fait qu’empirer une situation qui se dégrade depuis plus de dix ans : les transporteurs doivent subir des délais de paiement trop élevés. Il est pourtant possible, à l’échelle de chaque entreprise, de briser le cercle vicieux. Le comportement de paiement des transporteurs routiers belges est en amélioration. Selon Graydon, le pourcentage de factures honorées à date est passé de 59 à 68 entre 2011 et 2016. Il subsiste certes une catégorie de mauvais payeurs (9 % des factures non honorées plus de 90 jours après la date-limite), mais ce pourcentage correspond assez bien à la proportion de ‘cow-boys’ qui vont et viennent dans le transport routier. Pour qu’un transporteur soit payé de ses prestations, par contre, c’est une autre paire de manches… La différence qui existe entre les délais de paiement accordés par les transporteurs et les délais qu’ils subissent ne fait qu’augmenter. Entre 2005 et 2015, les transporteurs ont cherché à réduire les délais de paiement de 5 jours (de 47 à 42), mais dans le même temps, les délais de paiement réels passaient de 49 à 56 jours. Il y a donc aujourd’hui deux semaines entre le rêve et la réalité. C’est davantage que la moyenne belge (12,5 jours en moyenne). Et nous ne parlons ici que de moyennes… qu’il faut toutefois pondérer. Le cas des travaux publics est bien connu, avec ses délais de paiement qui atteignent parfois 90 ou 120 jours. Etant couvertes par les pouvoirs publics, ces créances sont toutefois plus certaines. Ce ‘triple A’ virtuel est d’ailleurs particulièrement suivi par les banques.

Au stade de la négociation Plus inquiétant : la raison de ces retards de paiement n’est pas nécessairement due à la mauvaise situation financière des clients. On estime qu’un retard de plus de 60 jours signifie un risque de défaillance du client multiplié par 11. Dans le transport routier, de tels cas ne constituent pas la majorité des litiges. Et c’est au transporteur de se montrer beaucoup plus ferme, comme l’explique Raphael Cabolet, Partner du cabinet Intraco Consulting : « Réduire les délais de paiement commence par les conditions de vente. Il y a souvent un déséquilibre de forces entre le transporteur et son client, mais le transporteur peut toujours essayer d’influencer ces délais. Si, au lieu d’être payé 1,50 EUR/km avec un délai de 90 jours, vous obtenez 1,49 EUR avec un délai de 30 jours, vous allégez sérieusement la pression sur votre trésorerie. » Pour réussir ce type de négociation, il faut évidemment avoir une idée très précise de son cash-flow, et pas seulement de sa rentabilité. Si un délai de 30 jours semble devoir être la norme, il est cependant possible de descendre en dessous. Raphael Cabolet : « C’est possible dans le cas d’une relation de longue durée, mais les délais de paiement font partie d’une négociation commerciale au même titre que le prix. » Cabolet conseille également de jouer sur la psychologie du comptable : « Si vous n’indiquez pas ‘paiement comptant’ ou ‘30 jours fin de mois’, mais bien une date précise d’échéance, vous faites sortir le comptable de sa zone de confort. L’expérience montre que cela raccourcit les délais de paiement ! » Autre conseil d’Intraco au stade de la négociation : lier les délais de paiement à l’obtention d’un indicateur de performance : « Si le transporteur réussit à améliorer un KPI crucial pour son client, il doit être possible de transformer ce progrès en win-win. C’est alors au commercial de jouer, et la réduction des délais de paiement peut même lui être proposée comme objectif complémentaire. » Il est aussi facile de réduire le délai de facturation. Trop de transporteurs attendent encore la fin du mois. « Si vos chauffeurs sont équipés d’un simple smartphone, ils peuvent lancer le processus de facturation presque en temps réel, sans attendre que le chauffeur rentre à la base », explique R. Cabolet.

En cas de problème Une fois les délais de paiement fixés, encore faut-il les faire respecter. « Cela ne coûte rien d’envoyer un email rappelant une facture qui va arriver à date, poursuit Raphael Cabolet. Une fois le délai expiré, agissez dès le lendemain, mais progressivement : un premier rappel normal, puis un deuxième quinze jours plus tard avant de passer au recommandé après 30 jours. Ne négligez pas non plus l’impact du fax. Un fax peut être imprimé par un collègue, lu par un autre qui est venu chercher ses copies à l’imprimante… Aucun comptable n’a envie que le personnel pense que sa société est peut-être considérée comme un mauvais payeur ! » Reste le factoring, qui consiste à transférer sa créance vers un tiers qui vous paie la créance anticipativement et la récupère (avec intérêts) auprès du client. Mais cette avance d’argent n’est pas sans risque… « Une société de factoring n’est pas quelqu’un qui va simplement vous garantir que vous serez payé de vos ‘mauvais’ clients. Elle voudra mettre la main sur tout votre portefeuille pour réduire ses propres risques. », explique Raphael Cabolet. « Et n’oubliez pas que cela ne vous exonère pas de votre obligation de motiver votre client à payer, sous peine de devoir vous-même payer des intérêts de retard à des taux qui s’approchent de ceux que votre banque vous prélèvera pour un crédit de caisse ! » Le factoring n’est donc pas une arme à utiliser sur le court terme.

1 mois = 1 camion !

Par tranche de 2 million EUR de chiffre d’affaires Trésorerie disponible si réduction de 30 jours effectifs : 100.000 EUR 100.000 EUR = 1 camion !

  Les 10 commandements 

  • Mesurer, à côté des paramètres de rentabilité, les paramètres de trésorerie en temps réel
  • Imposer 30 jours comme délai standard (si possible)
  • Négocier le délai de paiement en même temps que le prix
  • Lier la réduction du délai de paiement à un KPI à atteindre
  • Lier la rémunération des commerciaux (aussi) aux délais de paiement
  • Facturer en temps réel, pas en fin de mois
  • Indiquer une date limite plutôt qu’une mention ‘comptant’ ou ’30 jours fin de mois’
  • En cas de retard, agir déjà à J+1
  • Envoyer des rappels par fax
  • N’utiliser le factoring qu’avec prudence

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